Le début du 20ième siècle est une course à la guerre, entre les grandes nations européennes, les empires Allemands, Autrichiens, Russes Anglais, et la République Française. La course aux colonies commençait au milieu du 19 ième Siècle, a amener une grande concurrence entre ces états. Le rayonnement culturel, diplomatique et industriel y sont aussi pour beaucoup. Alors que les peuples européens voient leur niveau de vie progresser, tant sur le plan social, culturel, que de la santé, cette vertueuse spirale de la » Belle Epoque » va être stoppée nette en Août 1914.
Depuis de nombreuse années en France, la politique de la revanche, suite à la guerre de 1870 qui nous a vu perdre l’Alsace et la Lorraine, est latente, tant sur le plan politique et diplomatique, que social et éducatif et que sur le plan militaire.
L’armée n’ a eu de cesse que de se préparer a une éventuelle reprise de ces départements et a battre l’ennemi devenu héréditaire : l’Allemagne
A cette époque, le service militaire était encore obligatoire mais avait largement évolué depuis la Loi Tiers du 27 juillet 1872 : Le rapporteur de la loi, le marquis de Chasseloup-Laubat, présente le service militaire comme une nécessité sociale qui s’imposerait à notre pays alors même que la défense de notre sol ne le commanderai pas impérativement, car il est un lieu de création de lien social et contribue à l’unité nationale. Cette loi créée une obligation militaire s’étendant sur une période de 20 ans. Le tirage au sort est maintenu. Le remplacement est supprimé mais on peut être dispensé pour diverses raisons dont soutien de famille. Établissement d’un registre de matricules par département à partir des listes cantonales de recrutement, mentionnant l’incorporation et tous les changements (affectation, domicile etc…. …) jusqu’au passage dans l’armée territoriale. Le service se décompose comme suit :
5 ans dans l’armée active – 4 ans dans la réserve d’active.
5 ans dans l’armée territoriale – 6 ans dans la réserve territoriale.
Puis la Loi Freycinet du 15 juillet 1889 : Elle fait progresser le principe de l’universalité de la conscription. Le service est réduit à 3 ans mais il y a désormais des dérogations. Les « dispensés » doivent un service d’un an réduit à 10 mois pour les bacheliers et étudiants. Les exemptés du service actif sont affectés à un service auxiliaire. Le tirage au sort continue et les bénéficiaires ne font qu’un an. Par contre, les dispensés, exemptés et tirés au sort doivent payer une taxe militaire destinée à compenser leur régime de faveur. Un tiers de chaque classe d’âge fait un service d’un an. Le rôle social du service militaire est important : c’est une initiation à la modernité pour le plus grand nombre issu du monde rural par la découverte de la ville, l’initiation au maniement d’équipements plus sophistiqués que leurs équipements agricoles, découverte de l’eau courante, d’autres mœurs, coutumes et l’occasion d’apprendre le français pour ceux qui ne parlent qu’un patois ou une langue régionale. C’est un réel facteur de cohésion sociale qui sera renforcé par la loi suivante.
Par la loi du 21 mars 1905 (loi Jourdan-Delbel), le Ministre de la guerre, le général André, met fin au tirage au sort et impose un service militaire personnel et obligatoire pour tous d’une durée de 2 ans (au lieu de 3 depuis 1889). Toute dispense est exclue.
Le 7 août 1913, la durée du service est augmentée de 2 à 3 ans pour faire face aux classes allemandes beaucoup plus nombreuses que les françaises. L’armée Impériale disposait de 850.000 hommes contre seulement 540.000 en France.
LÉOPOLD AU SERVICE MILITAIRE
Léopold Chazeaud a 20 ans en 1911, il fait donc parti de la classe 1911 et il est appelé au service armée à la subdivision de Bordeaux 7 et porte le matricule 3690.
Le 8 octobre 1912, Léopold est affecté au 18 ième RI (Régiment d’infanterie ) de Pau, avec son matricule définitif numéro 3491
Nous n’avons pas de photos de lui en tenue à cette époque, mais voici a quoi ressemblait son uniforme en 1912.

Le 2 Décembre 1913, Léopold est promu 1 ière Classe.
SON UNITÉ : LE 18 IEME RI
Voici d’abord, ce que nous appelons la « pucelle » du régiment, une sorte de « pin’s » qu’a du a l’époque arboré Léopold.

Ce régiment est cantonné a Pau, avec un cantonnement aussi à St Jean Pied de Port . Il fait partie de la 72 ième Brigade d’Infanterie, 36 ième Division d’ Infanterie, 18 ieme Corps d’Armée. Ce régiment va se retrouvé sur tout les fronts entre 1914 et 19 18, dont le Chemin des Dames.

Voici une photo d’hommes faisant partie du 18 ième RI, peut être des camarades de Léopold. Date et lieux de ce document sont inconnus.
Le 2 août 1914 , au déclenchement de la guerre, Léopold fait du partie du 18 ième RI commandé par le Colonel GLOXIN. A cette date, le Colonel signe l’ordre de mobilisation en précisant :

Le Colonel Gloxin, Commandant du 18 ième RI
» C’est avec calme courage et entrain que le 18 ième recevra le baptême du feu et s’élancera sur l’ennemi , faisant ainsi honneur à son historique et à ses traditions et saura mériter à nouveau sur le champs de bataille les nobles paroles que Bonaparte lui adressait à Rivoli :Brave du 18 ième, je te connais, l’ennemi ne tient pas devant toi » Gloxin ajoute aussi que » le 218 ième et 143 ième Régiment territorial, prolongement du 18ième RI, sauront eux aussi faire leur devoir « .
Léopold se trouve donc au sein du 2ième bataillon du Commandant Tuffal, 5ième compagnie du Capitaine Chaubes , 2ième Etranger du Lieutenant Dufau.
Le 6 août, dans les délais fixés par le journal de mobilisation, il était prêt à partir avec l’effectif de 57 officiers dont 4 médecins et 3 326 hommes et gradés, sous les ordres du colonel Gloxin. Il était enlevé par trois trains, un par bataillon. Le 1er bataillon avec le général commandant la 72e brigade et son état-major quittent Pau le 6 août 1914, à 13 h. Le 2e bataillon avec le colonel et l’état-major du régiment à 17 h. Le 3e bataillon à 20 h.

Départ de la Gare de Pau du 18 ième Ri, le 6 Août 1914.

Voici le départ du 2ieme Bataillon et de l’Etat Major, Léopold est sur cette photo , en train de défilé dans Pau, en direction de la Gare, sous les vivas de la foule.
Début août 1914, son régiment se trouve transférer en Lorraine, puis va se retrouver engagé dans la bataille de Chaleroi et de Guise
LA BATAILLE DE CHARLEROI
Voici donc le récit de cette bataille, ou notre arrière grand-père et grand père fut jeté avec son unité du 20 au 23 août 1914. Il avait alors 23 ans……
Cliquez sur le lien pour découvrir cette bataille.
http://www.sambrerouge14-18.be/gozee/
Durant ces durs combats, Léopold va être blessé, le 23 août 1914, après avoir réaliser un fait de guerre, dont nous pouvons être fiers, et aussi nous imaginer à quel point cela a du être terrible, tant sur plan physique , car il va être grièvement blessé, mais aussi sur le plan psychologique.
Etat de ses blessures :
- une balle dans la cuisse droite
- un éclat d’obus dans le poignet gauche
- 5 éclats d’obus dans les reins.
Que s’est il réellement passé, lors de ces terribles journées du 20 au 23 août, et plus précisément celle du 23, ou Léopold joua un rôle important au sein de son unité ?
Mes recherches m’ont permis de le découvrir, avec des archives sur le 18 ième RI, et quelques contacts avec des historiens locaux. Plus particulièrement un livre : » L’Historique du 18 ième R.I » écrit par le Colonel Stépan du 18 RCP de Pau . Le 18ième RCP (Régiment de Chasseurs parachutistes) est le régiment qui remplacera le 18 ième RI.
Voici tout d’abord l’ordre de Bataille du Régiment ( Cliquez dessus pour l’agrandir )

Léopold, est dans le 2ième Etranger commandé par le Lieutenant DUFAU, de la 5ième compagnie du Capitaine Chaubes.
Le 18 août, le 18ième est débarqué a Avesnes sur Helpe à 17 heures, puis le 19 et le 20 en direction de Solre le Château , via Semousies, puis cantonnement à Solre. Soit une progression de 18 km à pied en direction du front.
Le 20 août , le 18ième stationne a Solre, et prépare son départ pour le 21 août en direction de la frontière Belge qui est franchie en milieu de journée du 21. Pendant la marche, la population Belge témoigne aux soldats français un vif enthousiasme. Plusieurs fois, les hommes du 18ième sont accueillis en héros et applaudis par la foule sur leur passage. Le soir du 21, le 18ième se cantonne dans le village de Montigny St Christophe, avec 2 bataillons. Le troisième se trouve lui à Thirimont.
Le 22 août, étape de Montigny à Marbaix la Tours, en direction de CHARLEROI, ou les allemands alignent entre Charleroi, Namur, et Dinant 3 armées. A Marbaix, les hommes entendent le canon, ils ne sont qu’à quelques kilomètres du front et des allemands. Le 18 ième RI, se voit donc confier le secteur entre Marbaix, Beignée et Florenchamps. Au nord de cette position le 49 RI, sur une ligne Gozée Thuin.

Le 18ième s’organise sur le plan défensif, et dispose ces effectifs de la manière suivante :
- 1ier Bataillon : Beignée
- 2ième Bataillon : ( Celui de Léopold) en avant de Marbaix
- 3ieme Bataillon : Florenchamp
A partir de cette date, la bataille dite de Gozée s’enclenche. En effet le Général Lanrezac de la 5 ieme Armée Française, décide de décaler son assaut sur la Sambre ( vers Charleroi) du 21 au 23 aout 1914.
Les allemands devancent cette attaque des le 21 aout. Donc lorsque le 18ième arrive dans le secteur qui lui est désigné, les allemands, sont en train de porter leur effort depuis Charleroi, en direction de la Sambre, et donc de Gozée Marbaix.
Dans les 3 Bataillons, la moitié de l’effectif passa la nuit du 22 au 23 août dans les tranchées, l’autre moitié en cantonnement d’alerte.
Le 23 août au matin, les premières unités du 18ième RI , et plus particulièrement du 2ième Bataillon commence a être en contact avec les Allemands, qui sont à la lisière du Bois du Prince au Nord de Gozée. Le 18ième effectue son contact avec le 49ième RI.
A 12 h30 : le 2ième bataillon est au contact avce les Allemands, qui débouchent du Bois du Prince.
A 13 h les troupes du 49 ieme au sud de Gozée sont refoulées. Une jonction entre le 2ième Bataillon du 18 ième, et une compagnie de mitrailleuses et des effectifs d’infanterie du 49ième RI est faite à Marbaix.
Au même moment des hommes du 3ième Bataillon, et des hommes du 49 ième tente de reprendre Gozée.
A 14 h, le village de Marbaix est investi par les faces ouest ( Gozée ) et Nord (Bois du Prince). Les hommes du 2ieme bataillon, subissent un feu nourri des allemands, mais en fait les français perdent peu d’hommes, car ils sont dans les tranchées.
Mais lors de cet assaut, une section de la 5ieme compagnie du Capitaine Chaubes, dont fait partie le 2ieme étranger de Léopold, est touché par un obus dans la tranchée, lui causant de fortes pertes et des blessés.
le 1ier bataillon du 18 ieme RI, a pour mission sous le feu de l’ennemi, de se portait sur le flanc Est des allemands, pour dégager la pression sur le 2ieme Bataillon à MARBAIX.
C’est a ce moment là que se joue ce qui va faire que Léopold, va être blessé puis fait prisonnier.
A 14 h30, le Lieutenant Dufau ( qui commande le 2ieme étrangers de Léopold) se porte lui même avec une demi section sur la ligne de feu, afin de desserrer l’étau sur la 5ieme compagnie. En traversant un terrain découvert, battu par l’artillerie, l’infanterie et des mitrailleuses, lui et tout ces hommes sont atteints.
Léopold, blessé à la cuisse droite par une balle, couché au sol, entend pres d’un trou d’obus, le cri de » A moi, A moi, » du Lieutenant Dufau, grièvement blessé. Léopold se porte sur lui, et durant quelques minutes, tient la main du Lieutenant en train de mourir. Dufau, lui donne un billet de 1000 francs ( les bonis du 2ième Étrangers, c’est à dire la solde ), puis il meurt. Il avait a priori 23 ou 25 ans. Le même age que Léopold. Il décide donc de brûler les papiers militaires ( Cartes, carnets ) puis aurait pris une montre et une bague de ce lieutenant.
Léopold aurait rejoint ces camarades, et se rendant compte que sa section ne possédait plus de sous officiers non plus, décide d’en prendre le commandement, et de tenter de résister à l’assaut allemand, de plus en plus pressant.
C’est a ce moment là, qu’il fut grièvement blessé par un obus, dont il reçut les éclats dans les reins et le poignet gauche.
La grande inconnue est de savoir ce qui s’est passé âpres : a t il été abandonné, considéré comme mort, est il le dernier survivant de sa section ou de la tranchée ? Fut il récupérer par des infirmiers français, et ramener à l’arrière ?
Seule chose dont nous sommes sur, c’est qu’il sera fait prisonnier.
La bataille de Gozée Marbaix, coûta 3000 hommes du côté français, et 27 000 sur la bataille de Charleroi.